Plan eau du Gouvernement

Des dissonances qui diluent de bonnes mesures

Avec le Plan eau, le Gouvernement repolitise la question de l’eau, ce dont se félicite la FNCCR, association nationale regroupant plus de 600 collectivités locales et établissements publics en charge de ce bien commun.

Après des semaines intenses de concertation auxquelles elle a participé, la FNCCR se réjouit de l’adoption de plusieurs actions proposées ou soutenues par ses élus, directement concernés par les effets de la sécheresse et de la dégradation de la qualité de l’eau. Cependant, la Fédération regrette des décisions parfois contradictoires et s’interroge sur les perspectives de financement au-delà des effets d’annonce.


Sobriété et qualité dans les tuyaux, enfin.

La FNCCR a analysé les mesures annoncées par le président de la République au Lac de Serre-Ponçon et salue globalement la volonté d’agir pour économiser l’eau et préserver la ressource dans un contexte de dérèglement climatique.

Si la sobriété est bien à l’agenda du « Plan », tout comme la nécessaire affirmation de la priorité au stockage de l’eau dans le sol et les nappes, les mesures concrètes demeurent en deçà des enjeux et des propositions. Le texte n’évoque pas d’abaissement des seuils de déclaration de prélèvements d’eau, ni de limitation des dérogations à l’obligation de comptage de l’eau prélevée dans le milieu naturel. En outre, seuls les plus importants prélèvements d’eau (plus de 200 000 m3/an) seront soumis à l’obligation, à terme, de comptage « intelligent ». Ce sont là des écueils en matière de transparence et de gestion dynamique des ressources en période de sécheresse.

La FNCCR soutient la réutilisation des eaux usées à condition qu’elle ne se fasse pas au détriment du fonctionnement du milieu et des usages avals.

La FNCCR approuve le cap vers une agriculture à bas niveau d’intrant et l’accompagnement vers des pratiques durables. Cependant, cette orientation devrait relever du plan stratégique national de la politique agricole commune et de son financement, et non de la planification de l’eau. Ces 100 millions d’euros supplémentaires mobilisés sur le budget des agences de l’eau à cette fin, sont-ils réellement incitatifs face aux 9,3 Md€ du budget de la PAC en France ?

En cas de dépassement des limites de qualité de la ressource en eau par un pesticide toujours utilisé, le préfet devra désormais prendre automatiquement des mesures de gestion permettant de juguler le risque. C’est une demande que la FNCCR avait déjà portée lors des négociations sur la transposition de la directive eau potable en 2022. Toutefois, ces mesures n’interviendront qu’une fois les limites dépassées alors qu’il faudrait agir de façon préventive. De surcroît, la FNCCR déplore que la pollution par certaines molécules détectées plusieurs années après leur interdiction, ne fasse pas l’objet d’une responsabilisation des émetteurs d’origine (Chlordécone dans les Antilles ou Chlorothalonil plus récemment) : le principe pollueur-payeur doit être substitué à l’actuel pollué-payeur. Plus généralement, la FNCCR continue de plaider pour que l’utilisation des pesticides de synthèse soit interdite d’ici 10 ans dans les zones de captage d’eau. Ces espaces pourraient en outre devenir les sites démonstrateurs de l’agroécologie avec l’ambition d’accompagner l’agriculture vers le « zéro phyto ».

 


L’eau reflue dans les politiques publiques, tant mieux

Gestion par bassin versant, sans oublier les nappes souterraines, transversalité et mises en cohérence des politiques publiques nationales et locales, concertations entre les usagers fondées sur des diagnostics et prospectives étayées par la science, la FNCCR appelle à une re-politisation de la gestion locale de l’eau qui ne doit pas se limiter à des approches techniques et des procédures administratives.


 

En matière de financement, le plan ambitionne de générer six milliards d’euros supplémentaires pour l’eau en France et mobilisant 575 M€ d’aides publiques supplémentaires. Un tel effet levier semble peu réaliste, d’autant que la quasi-totalité de ces aides (475 M€) seront financées par les agences de l’eau et donc par des taxes perçues auprès des usagers. La FNCCR a toujours milité pour un financement fort des agences de l’eau et salue donc l’augmentation potentielle de leurs recettes. Alors que les usagers de l’eau et de l’assainissement contribuent aujourd’hui à hauteur de 83 % à leur budget, la FNCCR persiste à demander le rééquilibrage des contributions des différents usages et s’oppose à ce que les usagers des services d’eau et d’assainissement financent ces augmentations.

 

Vers une tarification incitative de l’eau

La FNCCR est aussi d’accord avec la facilitation de « la mise en place par les collectivités d’une politique tarifaire adaptée aux enjeux des territoires » et invite le Gouvernement à prendre les mesures permettant ces adaptations locales, et en particulier les possibilités de tarifications différenciées pour les résidences secondaires, les usagers des puits et autres forages privés, et la tarification saisonnière, même là où il n’y a pas encore de déséquilibre entre ressources disponibles et prélèvements. En revanche, elle s’inquiète d’une éventuelle obligation de mise en œuvre de tarifications progressives. En effet, d’une part, le choix de la politique tarifaire appartient aux élus locaux en fonction du contexte de leur territoire, et d’autre part, faute d’accès aux données d’usages de l’eau, de telles tarifications peuvent être ni incitatives, ni équitables, ni sociales.

 

Contact presse : Alexandre ALLION – a.allion@fnccr.asso.fr – 06 26 41 64 91

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