Changer d'échelle pour réussir la transition énergétique

Bilan journée bois-énergie 2021

A l’occasion de la deuxième journée bois-énergie, qui a eu lieu en visioconférence le 18 mai dernier, le public ainsi que les différentes parties-prenantes ont pu témoigner, échanger et répondre aux questions sur la première énergie renouvelable de France. La participation à cet évènement - près de 900 inscrits et 730 connexions, une moyenne de 300 connexions par table-ronde et plus de 1600 visionnages au total - atteste de la vivacité des enjeux liés au bois-énergie.


En plus des acteurs de la filière, cette JBE 2021 a ainsi attiré des publics variés : 16 % de collectivités, 12 % d’institutionnels, 3 % de journalistes et 2 % d’associations environnementales. Et tous font le même constat : tous les feux sont au vert, il faut maintenant accélérer !

La ressource est là, et la filière bois-énergie reste attentive à sa gestion
Les participants à la table-ronde « Ressources » s’accordent à dire que « les objectifs que s’est fixée la France en termes de production de chaleur renouvelable à partir de biomasse sont ambitieux (augmentation entre 30 et 40 % d’ici 2028). Ils sont basés sur des études de disponibilités de la ressource qui permettent de s’assurer que les prélèvements restent en dessous de l’accroissement naturel de la forêt. » (Emilie Machefaux, ADEME), mais que « les disparités régionales sont importantes, dues à une couverture forestière hétérogène sur le territoire. Les objectifs ne sont pas atteignables dans toutes les régions de la même façon. Il faut aussi raisonner localement. » (Nathalie Korboulewsky, INRAE). Il est également important de rappeler que « le bois-énergie est un sous-produit de la forêt, qu’on ne plante pas de forêts pour faire du bois de chauffage.

L’exploitation forestière cible le bois d’oeuvre. Dans les petites propriétés privées, le bois-énergie rentabilise l’exploitation forestière. Il garantit la pérennité de la ressource sur le long terme » (Éric Boittin, EFF). C’est ce
qui conduit les participants à insister à la fois sur l’importance de la gestion durable des forêts dans « le contexte d’incertitude (sécheresses, insectes…) qui pèse sur le rôle des forêts dans l’atténuation du changement climatique » (Sarah KHATIB, FNE) et, d’autre part, sur le fait qu’« Il faut aussi aller chercher d’autres gisements, des sous-produits de l’industrie/agricoles, plus le bois déchet pour alimenter les chaufferies bois » (Emilie Machefaux).

Le renouvellement du vieux parc d’équipements domestiques va être accéléré
« La part du chauffage collectif dans l’ensemble des émissions est inférieure à 1 %. » : comme l’explique Benjamin Cuniasse (CITEPA), la réduction des émissions de particules fines passe majoritairement par l’interdiction des foyers ouverts et le remplacement des vieilles installations individuelles. Les fabricants ont fait d’énormes progrès technologiques : « en 15 ans, les émissions à particules ont été divisées par 10 sur les appareils individuels ; moins significatifs sur les chaufferies collectives car ils étaient meilleurs au départ – aujourd’hui on leur en demande toutefois plus, comme brûler d’autres types de bois tel le bois déchets avec la même exigence de performances. » (Yann Rogaume, Université de Lorraine). « La règlementation européenne EcoDesign sur les chaudières, qui entrera en vigueur le 1 janvier 2022 pour les appareils indépendants (poêles) est déjà en application depuis le 1er janvier 2020. Cela a permis l’arrêt de la vente de chaudières non performantes. Les progrès réalisés par les constructeurs entre 2005 et 2020 sont énormes : les rendements sont passés de 60 à 90 % et les émissions de particules de 180 à 16 mg. » (Eric Trendel, SFCB / HS). « Les Plans de Protection de l’Atmosphère (PPA) notamment dans les zones les plus denses sont des outils incontournables pour travailler sur la qualité de l’air. Il faut poursuivre les incitations au renouvellement en commençant par supprimer les appareils les plus vieux comme en Allemagne » (Aymeric de GALEMBERT, Président du Groupe Seguin, Co-Président de la commission Chauffage au bois domestique du Syndicat des énergies renouvelables (SER).

De plus en plus de collectivités locales impliquées et motrices
Pour les territoires, notamment ruraux, le bois-énergie présente de nombreux avantages. C’est un moyen de valoriser la ressource locale et de produire une énergie aux coûts maîtrisés : « Au début, les exploitants des forêts, et notamment les petits exploitants, ne croyaient pas au bois-énergie. Mais la filière s’est très bien développée grâce à l’amélioration et à la constance de la qualité, désormais acquise. De plus, l’utilisation très locale a permis des prix compétitifs car les coûts de transport étaient réduits », explique Michel Feyrit, Président du SIPHEM, et « aujourd’hui on va plus loin, le bois-énergie est une action forte de leur plan climat-énergie intégré à un programme incluant économie d’énergie, usages du bois construction et Énergie, jusqu’au développement du label carbone ». « La lutte contre la précarité énergétique est un atout à faire valoir » pour Stéphane Magot, Président du SYDED du Lot, acteur de longue date du bois-énergie, avec comme point de départ la valorisation des bois déchets et la solidarité tarifaire qui aboutit aujourd’hui à 15 réseaux de chaleur. « Le bois-énergie est en dehors du champ de la spéculation mais le prix bas actuel des énergies fossiles rend plus difficile la compétitivité des solutions réseaux de chaleur renouvelable. » Pour Michelle Laborie, Adjointe au Maire d’Aurillac en charge de la Transition Écologique et de Défi Climatique, «il faut une grosse volonté politique et s’appuyer sur les structures locales, comme les animateurs bois-énergie, qui connaissent bien le sujet et le tissu local. La réflexion avancée du premier réseau de chaleur date de 2011. Aujourd’hui, le réseau de chaleur de la ville d’Aurillac c’est 22 km de long, 50 GWh/an livrés et 75 sous-stations. C’est un projet assez important. On a été débordé par l’engouement, les habitants sont vraiment demandeurs, les bailleurs sociaux également. » Et Stéphane Magot de conclure cette table ronde : « Les solutions bois-énergie qui sont vertueuses sur le plan environnemental mais aussi sur le plan social et économique doivent être encouragées et aidées par l’État. Il est important que ce soient les collectivités qui portent les projets de réseaux de chaleur. La volonté de la région Occitanie de devenir une région à énergie positive sera une opportunité pour de nouveaux financements pour suppléer le financement du Fond chaleur pour les petits réseaux de chaleur. Il faut se donner les moyens pour avoir une vision globale. »

La compétitivité des entreprises et la décarbonation de l’industrie passe par l’utilisation de la biomasse
« La transformation du bois a beaucoup d’atouts car elle n’a pas d’impact en énergie grise, que ce soit en électricité ou en chaleur – et bientôt pour le transport – tout en valorisant les différentes vies du bois », a tout d’abord rappelé Jean-Pascal Archimbaud (Groupe Archimbaud). « L’utilisation de la biomasse est parfaitement adaptée aux industries qui ont besoin de vapeur et en continu, comme l’industrie agroalimentaire, la papeterie, les industries qui font du séchage » explique Bruno Bellamy (Dalkia). « Le principal frein est la question de la compétitivité. C’est possible avec une biomasse constituée de « bois-déchet », et grâce à un certain nombre d’aides de l’ADEME. Et c’est un bon message pour les industriels : n’hésitez pas à aller vers la biomasse car non seulement on va vous aider à financer la construction, mais en plus, il y a un dispositif qui va vous aider à compenser un éventuel déficit de compétitivité de ce combustible. » « La décarbonation des industries est un axe majeur du Plan de Relance Européen, c’est 1,2 milliards d’euros. Les aides vers l’industrie sont destinées à réduire les émissions de gaz à effet de serre (18%) mais c’est aussi un enjeu majeur de compétitivité de nos industries », appuie Adrien Thirion (ministère de l’Économie des finances et de la relance). « L’utilisation de la biomasse a un effet indéniable sur la balance commerciale. Et c’est créateur d’emplois sur le métier de la forêt mais aussi sur le métier du recyclage, on va mieux trier ce bois-déchet.»  Pour conclure cette journée consacrée à la thématique du « changement d’échelle », Mathieu Fleury, Président du CIBE, a déclaré : « Il est urgent de développer le bois-énergie : ce sera bénéfique pour les forêts, pour lutter contre la précarité énergétique, pour les industries. Et donc pour les territoires et leurs habitants. ». En effet, comme cela a été rappelé lors de la table-ronde « parlementaire » de cette JBE 2021, « le bois-énergie a un très bon bilan carbone.
C’est un beau projet qu’il faut pouvoir porter tous ensemble. L’énergie à partir du bois permet de trouver l’indépendance vis-à-vis des énergies fossiles. C’est aussi la stabilité du prix de l’énergie pour les citoyens (précarité énergétique) et pour les entreprises. » Ainsi la filière bois-énergie en appelle aux responsables politiques pour relancer un groupe de travail sur la première énergie renouvelable de France et se positionner sur la question de la taxe carbone, possiblement à travers une taxation à l’entrée de l’Europe. Car pour changer d’échelle, il va falloir appuyer sur l’accélérateur !

Pour revoir la journée bois-énergie, c’est ici.

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